Retour de Tamanrasset — Diocèse de Besançon

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Retour de Tamanrasset

Le pèlerinage diocésain à Tamanrasset a eu lieu cette année du 17 au 25 février. Un tel voyage ne laisse pas indifférent, comme en témoigne à son retour un des pèlerins : "Libres propos" signés Michel Deblock.

Laisser passer quelques jours après le retour permet de décanter, de relativiser certaines sensations, de mettre l’accent sur ce qui apparaît bientôt comme essentiel.

Oubliés la fatigue du transport, les attentes incompréhensibles, la minceur du matelas, la fraîcheur du petit matin, les secousses du 4X4, les deux kilos perdus on ne sait comment et - hélas - retrouvés bien vite, the last but not the least : les wc à la turque, voire l’absence de wc tout court. Voilà, c’est dit. Mais peut-être - sans doute - ces inconforts tout relatifs préparent-ils l’âme à se disposer à d’autres défis.

 Mais là ne s’arrête pas cette alchimie qui vous invite à accueillir l’aventure. D’abord l’invraisemblable négligé de la voirie de la ville. Ca ne passe décidément pas…. Puis l’étonnant paysage du massif du Hoggar. Un relief minéral, torturé, lançant vers le ciel, sortis des entrailles de la terre, ses cônes de lave durcie et éparpillant des scories à l’entour en un tapis noirâtre. Paysage à la fois sublime et désolant, respirant l’absence de vie au premier abord. Il n’a pas plu sur ce massif depuis 5 ans !

Et dans l’instant suivant, un dromadaire, surgi de nulle part, jetant un regard philosophique à l’entour, un troupeau de chèvres grignotant de maigres touffes d’herbes, un petit bouquet de fleur orange, blotti à l’abri d’une pierre, hésitant entre l’ombre tutélaire et la lumière vive. Et encore un improbable filet d’eau sorti du creux d’un rocher, se tortillant sur quelques centaines de mètres, pour disparaître à nouveau. Ici la vie sourd péniblement. Elle se bat pour exister ; rien n’est acquis facilement. Il va falloir que je m’en souvienne.

J’ai cependant des billes dans mon sac. D’abord le groupe, accueillant, chacun attentif à l’un et à l’autre, une organisation tip top, une animation spirituelle soignée, qui libère la Parole. Et puis ce désir de chacun, on le sent bien, de tracer son chemin, d’oser l’aventure, de se dépouiller pour se vêtir à frais nouveaux.

Il y a bien sûr les lieux incontournables à visiter, à habiter : l’ermitage de l’Assekrem, le bordj, la frégate. On y sent à chaque fois, quasi physiquement, la présence de Charles de Foucault.

Mais ce qui m’a le plus marqué, et que j’entends garder par devers moi, c‘est le témoignage des petits frères que nous rencontrons à plusieurs reprises. Avec eux, pas de considérations générales, de conseils, d’injonctions, de prêchi-prêcha édifiant, amphigourique. Quand ils ouvrent la bouche, c’est pour dire « je » en non pas « on », pour témoigner sans chichis de leur vie quotidienne. En Algérie il n’y a pas place pour la parole sur l’Evangile. Simplement tolérés, ils sont sur le fil du rasoir. Alors ils vivent simplement la vie de Jésus à Nazareth, suivant en cela l’intuition et l’exemple de leur fondateur.

Que n’y ai-je pensé plus tôt ! Les Evangiles ne parlent pas, ou si peu, de ces 30 années de vie cachée de Jésus. C’est la qualité de leur relation à Dieu et leur disponibilité aux personnes rencontrées qui font que le message passe… ou ne passe pas. C’est aussi simple que cela.

Je ne reviens donc pas les mains vides. Je songe à notre société occidentale qui n’interdit rien mais vit dans le désenchantement. N’y a-t-il pas là à s’inspirer du comportement des petits frères ? Une voie qui prend place à côté de celle de François qui invite à aller aux périphéries.

 Un dernier mot, une impertinence à laquelle je ne résiste pas. Je m’interroge sur la vie d’athlète de Charles de Foucault ; lui qui a été excessif dans toutes ses aventures. Il se voulait, à la fin, le dernier, ne laissant cette place à personne. Par ces temps de jeux olympiques, je l’imagine lorgnant la première place du podium de l’humilité. Si cela est vrai, c’est peut-être ce talon d’Achille, cette écharde dans la chair qui, paradoxalement, nous le rend accessible. Un frère, racheté, comme tout un chacun, ni plus ni moins, par la mort et la résurrection de son Seigneur. Je me suis ouvert de cette idée farfelue au frère Taher (40 ans de présence en Algérie). Il m’a dit, en souriant finement, que cette pensée l’avait effleuré…